Le président Fritch propose à Macron d’organiser un « One Island Summit »
Retrouvez l’allocution intégrale prononcée par le président Edouard Fritch à l’occasion du One Ocean Summit organisé dans la ville de Brest.
« O te miti nei ra te marae mo’a roa, e vahi hahano, e vahi raa, faatupuraa manava hirahira »,
« L’océan est le temple le plus sacré, c’est un lieu saint, un lieu inspirant à la fois crainte et respect ».
Cela fait 70 ans que la Polynésie protège les oiseaux polynésiens, organise une pêche traditionnelle et professionnelle raisonnée, ou interdit l’accès à certaines parties du territoire pour en préserver la Nature.
Il y a 20 ans, la Polynésie française devenait le plus grand Sanctuaire des mammifères marins au monde, avec la protection de toutes les espèces de requins, de tortues marines et de Mobula.
En 2018, la Polynésie française créait Tainui ātea, une aire marine gérée de 5 millions de km2 protégée par notre code de l’environnement. Cet espace poursuit les objectifs suivants : la préservation des espèces et de la diversité génétique ; le maintien des fonctions écologiques et l’utilisation durable des ressources et des écosystèmes naturels.
Oui, nous assurons la protection de nos 118 îles, tout en tenant compte du fait que, plus de 64% d’entre elles sont habitées.
Notre vision place l’Humain au centre de cette protection. Et pour nous, l’Humain est lié à la terre, à la mer et aux airs.
Notre vision est globale et systémique et nous voulons l’inscrire dans la durée.
Elle vise des objectifs d’amélioration du niveau et de la qualité de la vie, de réappropriation de concepts et de savoir-faire traditionnels et de création d’une solidarité entre les générations et entre les peuples.
Elle se décline en quatre Grandes Ambitions : Mou’a ti’a, la préservation du coeur de nos îles, Tai uta, la restauration du lien Terre-Mer, Tainui atea, la protection et la gestion durable de notre ZEE, Te Moana nui o hiva, la construction du Grand Mur Bleu du Pacifique.
Dans ce cadre, la Polynésie française est capable de prendre quatre engagements qui portent sur une superficie océanique de plus de 1 million de Km2.
1er engagement : multiplier les réserves de Biosphère
Nous finalisons les processus d’inscription des Îles Marquises au Patrimoine Mondial de l’UNESCO et de désignation des îles Australes en Réserve de Biosphère.
Cet engagement qui porte sur une surface maritime de près de 7.000 Km2, s’ajoute d’une part, aux espaces polynésiens déjà labellisés UNESCO, comme Taputapuātea et la Réserve de Biosphère de 19 000 Km2 de Fakarava, et d’autre part, à nos Réserves intégrales de 4 atolls que sont Taiaro, Manuae, Niau et Motu One.
2ème engagement : une protection des zones côtières
Un zonage côtier d’une surface maritime de près de 500 000 km², réservée à la pêche artisanale et vivrière, sera finalisé avant la fin de l’année en relation avec nos populations des archipels. Cette protection côtière marque un retrait de 20% des zones de pêche professionnelle actuelles.
3ème engagement : protéger les lagons et les coraux
Avant la fin de l’année, nous protègerons toutes les espèces de coraux.
Nos écosystèmes coralliens représentent une surface de 15.000 km² et cette action va concerner 20% des atolls dans le monde.
De plus, nous allons créer des zones de mouillages obligatoires afin de limiter l’impact des mouillages sauvages sur nos écosystèmes fragiles.
Monsieur le Président, mesdames et messieurs, ces trois premiers engagements polynésiens représentent déjà plus de 500.000 km² de surface maritime protégée, soit presque l’équivalent de la superficie de la France métropolitaine. Mais nous ne comptons pas en arrêter là.
4ème engagement : une nouvelle aire marine protégée de plus de 500 000 km2.
Cette année, à l’occasion des 20 ans de notre Sanctuaire Marin, nous lancerons le projet « Rahui Nui », une aire marine protégée d’au moins 500.000 Km2 située dans la partie sud-est de notre ZEE.
Nous comptons ainsi, à l’horizon 2030 : finaliser le projet Rahui Nui, poursuivre le classement de zones naturelles intégrales de certaines de nos îles, comme Taiaro ou Anuanuraro, lancer une vaste stratégie d’acquisition des connaissances de nos quelques 500 monts sous-marins recensés, initier les études pour la désignation de nouvelles réserves de biosphère et solliciter enfin, la reconnaissance de la Polynésie française en Zone Maritime Particulièrement Vulnérable.
Ces engagements nous obligent et nous savons pouvoir compter sur l’Etat, sur la France, pour nous accompagner et les réaliser.
Monsieur le Président de la République, cher Emmanuel Macron, pour clore mon propos, vous aviez évoqué , il y a trois ans, la possibilité d’organiser un Sommet rassemblant les peuples insulaires du monde entier. Vous l’avez souligné, nous, peuples du Pacifique, sommes les témoins, les acteurs mais aussi les victimes potentielles des effets du changement climatique et de l’état de santé de l’Océan. En écho à votre projet, Monsieur le Président, la Polynésie française est prête à accueillir cette première édition mondiale d’un « One Island Summit » et je vous propose de l’organiser au plus tard au mois de septembre 2023 à Tahiti.
Je vous remercie.