LP fiscale: Pomare dégaine son arme de la régularisation rétroactive
Pour la seconde fois, l’assemblée de la Polynésie française a été saisie pour entériner le projet de loi du pays portant diverses mesures fiscales du fait de son annulation par le Conseil d’Etat, le 25 mars dernier. Mais à l’évidence, plus les débats avancent, plus la fragilité du texte s’impose au grand jour.
Il n’y a pas pire sourd que celui qui ne veut pas entendre! Dans ce registre, il faut bien reconnaître que le ministre des Finances, Tevaiti Pomare, en tient une couche, lui qui, à la reprise des débats, ce jeudi (14h), a réaffirmé avec un aplomb déconcertant: « Nous croyons plus que jamais à la pertinence de nos mesures ». Les acteurs économiques apprécieront…
Mais surtout, le « grand argentier du Pays » croit détenir la solution à tous les problèmes liés à l’annulation du texte, au travers le dépôt d’un amendement prévoyant la rétroactivité des mesures prises à compter du 15 décembre 2023 jusqu’à maintenant. Le même qui, comme le président du Pays, niait jusqu’ici tout impact budgétaire. Cette régularisation rétroactive est justifiée, selon lui, pour assurer l’équilibre budgétaire. D’un point de vue juridique, c’est pas gagné. « Rendez-vous dans trois mois », a prédit Tepuaraurii Teriitahi (Tapura) pour qui un risque d’annulation demeure. Même son de cloche du côté de AHIP: « Si cette loi avait deux pieds, vous venez de vous tirer, Monsieur le ministre, une balle dans le gauche… » ironisé Nuihau Laurey.
En attendant, le Pays va faire – et c’est le but recherché – l’économie d’un remboursement pour trop-perçu ou à l’inverse, éviter d’aller collecter des recettes dues auprès des usagers. Ne serait-ce que pour les primo acquéreurs de terrains et autres biens immobiliers qui se sont manifestés durant la période concernée, ce sont pas mois de 30 millions de Fcfp qu’il convient de récupérer. Pire, la note est beaucoup plus salée pour les concessionnaires automobiles qui – théoriquement – seraient conduits à rembourser la bagatelle de 267 millions de Fcfp, ce qui correspond à dix-huit dossiers. « Pensez-vous qu’il faille les pénaliser ? » s’est ainsi interrogé M. Pomare.
Mais sans rentrer dans le débat de fond, les deux chefs de fil de la minorité, Edouard Fritch pour le Tapura, puis Nuihau Laurey au nom de AHIP, ont à tour de rôle fustigé l’entêtement du gouvernement et en premier lieu, du président Brotherson absent de l’hémicycle au moment de leur prise de parole. « La solution, elle est ici. Pas à Singapour », a ironisé Edouard Fritch. Avant que Nuihau Laurey ne préconise quant à lui « un report de la mise en oeuvre de cette LP dans le but de l’améliorer ». Mais cette voie de la raison semble rejetée en bloc par la majorité Tavini huiraatira, à l’instar de sa porte-parole, Elise Vanaa, par ailleurs présidente de la commission de l’Economie, qui s’est même payée le luxe de ne pas lire l’intervention de 20 pages qui avait été préparée à son attention. Probablement pour gagner du temps et rentrer plus tôt à la maison…?
Aussi, Tevaiti Pomare n’en démord pas: « La loi a été annulée pour la forme. A aucun moment, le Conseil d’Etat n’a dit que ce texte était mauvais et anti-économique (…) Je ne suis pas venu pour attendre. IL faut avancer… » Voici toute la conception de la concertation qu’il est appelé à mettre en oeuvre dans les mois à venir.
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