LP cannabis: de la visée thérapeutique au potentiel économique…
Encadrer le cannabis thérapeutique, oui ! Faire du business avec, non ! D’autant que cette plante a tendance à muter, au risque de dépasser le taux de 0,3% de THC… Telle est la position du groupe Tapura huiraatira à l’assemblée de la PF s’agissant du projet de loi du pays réglementant certaines activités relatives au cannabis dépourvu de propriétés stupéfiantes…, texte sur lequel il s’est abstenu.
Pour la majorité Tavini, la visée thérapeutique semble avoir été reléguée au second plan, plus soucieuse qu’elle est de « répondre aux attentes économiques de la population », comme l’a expliqué l’élue Rachelle Florés. Objectif clairement affiché: créer des revenus supplémentaires alors que déjà, 10% de la population avoue disposer de revenus tirés de la production de cannabis dans nos îles. Mais les indépendantistes assument l’idée de « construire une société où tout le monde a sa place ». Quand bien même le produit en question s’avère particulièrement nocif pour la jeunesse polynésienne…
En attendant, retrouvez quelques passages de l’intervention orale faite en séance par la représentante Cathy Puchon, au nom du Tapura huiraatira.
« Tout ce qui peut être fait pour soulager la vie de nos malades, dans leur combat quotidien contre les souffrances physiques, ne peut qu’emporter l’adhésion de la représentation territoriale. Sur cet aspect des choses, le projet de loi du pays règlementant certaines activités relatives au cannabis dépourvu de propriétés stupéfiantes et les médicaments contenant du cannabis ou des cannabinoïdes, a du sens. Le problème, voyez-vous, c’est que ce texte, tel qu’il a été imaginé et ficelé par votre gouvernement, va bien plus loin que le seul accompagnement thérapeutique. Avec le risque d’ouvrir ce que l’on a coutume d’appeler la « boite de pandore » en référence à la première femme mortelle de l’humanité, envoyée sur Terre par Zeus pour se venger des hommes. Vous connaissez la suite, mes chers collègues, puisque du fait de sa curiosité, c’est elle qui ouvrit la fameuse boite de pandore et qui fit s’échapper tous les malheurs dont les hommes ont aujourd’hui à souffrir ».
(…) « Mais en dépit des nombreuses interrogations soulevées et des besoins d’informations complémentaires exprimées plus de trois heures durant en commission législative, le 4 juin dernier, il n’en reste pas moins un sentiment partagé par tous et toutes, au-delà de nos sensibilités politiques, pouvant se résumer à cette petite phrase empruntée à l’une de mes collègues, à savoir que « nous marchons un peu sur des œufs… »
(…) « Pour ce qui est de réglementer certaines activités relatives au cannabis dépourvu de propriétés stupéfiantes, le même péril nous guette ! Prenez seulement l’exemple des tradipraticiens, ceux-là même que vous opposez à la médecine moderne – médecine qui, à vous en croire, ne guérit nullement nos malades mais ne sert qu’à enrichir certains… je referme cette parenthèse – allez-vous leur annoncer que leurs huiles de massage aux vertus apaisantes ne sont désormais plus conformes aux nouvelles règles éditées puisque pour la plupart, il est de notoriété publique qu’elles renferment un taux de THC supérieur à ce qui est autorisé ? Sur ce point, l’Institut Louis Malardé, établissement public du Pays accrédité pour mener toutes les premières analyses, est catégorique : la technique de l’enfleurage pour le cannabis aboutit, à coup sûr, à un taux de THC supérieur à la norme autorisée. »
(...) « Preuve encore que nous nous éloignons de la seule visée thérapeutique et du bien-être des malades, c’est le rôle éminemment important du ministère de l’Agriculture dans ce dossier. Car de l’aveu même du ministre de tutelle, la culture du cannabis a du potentiel ! Nous savions tous que ce gouvernement avait de grandes ambitions pour que la Polynésie française atteigne – enfin ! – son auto-suffisance alimentaire mais à n’en pas douter, cette nouvelle piste, non agricole il s’entend, risque d’en décoiffer quelques-uns jusque dans les rangs du Tavini… »
(…) « Enfin, ce dossier prétend revêtir une dimension sanitaire des plus inattendues puisque l’un des objectifs du gouvernement serait, je cite le directeur de cabinet du président absent, de « faire baisser le niveau d’addiction chez nos jeunes ». Ainsi, nos plantations, promises à devenir Bio moyennant un contrôle accru sur les taux de pesticides et de métaux lourds, pourraient s’inscrire à terme dans un schéma de prévention…J’ai les plus grandes peines à y croire ! Commençons déjà par déterminer les espaces publics dans lesquelles on pourra fumer du CBD ! Sans quoi, on risque de renifler du cannabis à tous les coins de rue, ce qui sera de nature à créer la confusion ainsi qu’un trouble manifeste à l’ordre public. »