Un « pacte fiscal » à construire avec les acteurs économiques
Le président de la Polynésie française, Edouard Fritch, a convié, vendredi dernier, les représentants du monde économique et social pour une restitution des travaux engagés dans le cadre du chantier de simplification et performance du système fiscal polynésien.
Cette rencontre, organisée par le ministre de l’Économie et des finances, Yvonnick Raffin, au lycée hôtelier de Punaauia, visait à rendre compte de travaux engagés au cours des derniers mois en matière de rénovation de nos codes des impôts et des douanes.
Elle était structurée en deux temps : en premiers lieu, la restitution des conclusions de l’audit à 360° de l’existant, puis l’exposé des ambitions du projet de simplification et performance du système fiscal polynésien suivi de l’examen détaillé des mesures.
Quelques extraits de l’allocution prononcée par Edouard Fritch à cette occasion.
Comme vous le savez, le statut d’autonomie de la Polynésie française lui confère depuis très longtemps la compétence fiscale, prérogative d’ordinaire régalienne car liée à des notions fondamentales telles que la souveraineté et le consentement à l’impôt. Ici, c’est l’Assemblée de la Polynésie française qui détermine, en lieu et place de l’Etat, l’assiette, le taux et les modalités de recouvrement des impositions de toutes natures.
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Les textes de référence de la fiscalité polynésienne, à savoir les codes des impôts et des douanes, ainsi que la convention fiscale entre l’Etat et le Pays, trouvent leur origine dans la période de fort développement économique lié à l’implantation du centre d’expérimentation du Pacifique (CEP).
Ce bouleversement économique sans précédent, marqué par l’afflux de capitaux extérieurs, a transformé en profondeur le modèle économique de la Polynésie, passant d’une « économie de comptoir » à une « économie de garnison », puis à une « économie de transferts », pour devenir, c’est ma volonté, une « économie endogène, durable, inclusive, solidaire, créatrice de valeur pour tous ».
Il nous faut donc aujourd’hui moderniser, ajuster, voir réinventer notre fiscalité pour qu’elle soit plus efficace, plus juste, plus moderne, afin qu’elle puisse répondre aux ambitions que nous formulons. Il faut enfin que la fiscalité soit un outil qui se mette au service des politiques publiques prioritaires que le gouvernement définit et promeut.
Je sais que certains chefs d’entreprises, se plaignent d’une pression fiscale qui ne cesse de croître alors que la quantité et la qualité des services publics sont jugés insuffisants, du moins perfectibles. En d’autres termes, le principe de « l’impôt-échange » n’apparaît plus pertinent tandis que celui de « l’impôt-redistribution » peine à démontrer son efficience. De même, vous nous reprochez de ne pas avoir initié une approche plus globale de la fiscalité qui prenne en compte les taux de prélèvement obligatoires des composantes fiscales et sociales. Sur ce point, je vous ai entendu et le ministre des Finances vous fera dans la journée des propositions qui vont dans ce sens afin de suivre, pour les entreprises et pour les salariés, ce taux de prélèvement obligatoire.
Les économistes, de leur côté, analysent globalement notre système fiscal comme peu incitatif et facilitant davantage la rente que l’entreprenariat et le développement.
Il y a là matière à réflexion et à débat car une société dynamique doit faciliter la réussite de ceux qui osent, de ceux qui investissent, de ceux qui tentent, de ceux qui rêvent !
Et pour permettre d’oser, il faut que les règles du jeu soient claires, simples et non équivoques. Là aussi, nous allons innover, nous allons simplifier.
Aujourd’hui, le dispositif fiscal polynésien s’apparente à un empilement de mesures (autrement dit : un mille feuilles) dont l’objectif a été de répondre bien souvent à des besoins conjoncturels sans nécessairement rechercher la cohérence d’ensemble.
Et je ne parle pas des mesures d’exonérations. Savez-vous, par exemple, que le budget 2021 prévoit plus de 12 milliards de XPF d’exonération de droits de douanes, alors que les recettes douanières sont évaluées à 50 milliards de Fcfp. C’est cette réalité que nous avons voulu objectiver pour mieux la comprendre et, demain, la faire évoluer.
La structure de notre politique fiscale doit donc évoluer pour répondre à l’exigence de clarté, à l’aspiration à plus de simplicité et à l’impératif de rendement.
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En cette période d’incertitudes et de tensions, il est essentiel de nous rassembler autour de valeurs communes et d’objectifs partagés. Et ces objectifs, ils sont simples : il faut renforcer la solidarité, et cela passe par un soutien à nos comptes sociaux, à notre Caisse de prévoyance sociale qui constitue, je vous le rappelle, le capital de ceux qui n’en n’ont pas. Il faut moderniser notre fiscalité pour faciliter la création d’emplois et la croissance de nos entreprises. Il faut simplifier nos procédures pour que notre système soit lisible pour les contribuables, particuliers comme professionnels.
Des objectifs simples et partagés !
C’est sur cette base que nous pouvons construire un pacte fiscal, un accord pluriannuel, une entente entre les pouvoirs publics et les acteurs économiques.
Voilà l’ambition qui est la nôtre ! Voilà le défi que je vous propose de relever ! Voilà l’esprit qui doit animer cette démarche !
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