Vent de panique à Santiago du Chili
Assis sur sa grosse valise, Henrry Martinez tente de prendre son mal en patience à l’aéroport de Santiago.
Ce Vénézuélien a fui la crise dans son pays pour commencer une nouvelle vie au Chili où, à peine arrivé, il a été surpris par l’explosion de la fronde sociale.
Des violences et des pillages, des transports publics paralysés, l’armée déployée dans les rues et un couvre-feu imposé dans la capitale ont bloqué des milliers de passagers dans l’aéroport international Arturo-Merino-Benitez pendant tout le week-end.
« J’ai vécu cela au Venezuela, donc je suis inquiet », raconte le nouvel immigrant de 50 ans, dont le regard perdu dans le vague traduit un mélange d’angoisse et de résignation. « La sécurité vaut plus que tout », insiste-t-il, se disant prêt à passer une nuit supplémentaire dans l’aéroport si besoin.
Pour arriver au Chili, il a déjà eu son lot de difficultés: il a traversé tout le Venezuela, quittant sa ville de Ciudad Bolivar, dans l’est du pays, pour se rendre à la frontière avec la Colombie, à l’ouest. De là, il a gagné Bogota, où il a embarqué à bord d’un vol en direction de Santiago.
Un vol qui lui a coûté 300 dollars, une petite fortune pour lui. Au moment du départ, il a bien eu vent de troubles au Chili, mais il n’avait pas le choix et il a embarqué.
« Au Venezuela, la situation est critique », raconte-t-il. « C’est difficile de vivre là-bas. Comme moi, des milliers de Vénézuéliens émigrent », rappelle-t-il. Selon l’ONU, 3,6 millions de Vénézuéliens ont quitté l’ancienne puissance pétrolière, depuis 2016 pour fuir la crise politique et les pénuries.
A l’inverse d’Henrry Martinez, qui attend désormais de pouvoir parvenir jusqu’au centre de la capitale, d’autres passagers ne savent toujours pas quand ils vont pouvoir rentrer chez eux: des dizaines de vols ont été annulés ou retardés depuis le début des troubles vendredi soir, en raison notamment des difficultés pour les employés de l’aéroport à rejoindre leur lieu de travail.
« Très similaire »
Des dizaines de passagers ont dormi sur des lits improvisés, à même le sol ou parfois sur des chariots à bagages installés en enfilade.
« Nous sommes là à cause du couvre-feu », explique Yamile Sanchez, une Péruvienne de 23 ans qui fait partie d’un groupe d’une centaine d’étudiants venus au Chili pour participer à une conférence scientifique.
Pour ne pas prendre le risque d’être bloqués à Santiago, où un couvre-feu a été décrété dimanche soir pour la deuxième nuit consécutive, le groupe est arrivé tôt à l’aéroport dans l’après-midi et patiente désormais depuis des heures.
« Nous ne savons rien. Lorsqu’ils annulent les vols, nous devons attendre dans d’interminables files d’attente pour savoir ce qui se passe », raconte l’étudiante. Leur vol n’a cessé d’être retardé et elle déplore de « rater des cours » à l’université.
La compagnie chilienne Latam, la première compagnie d’Amérique latine, a annulé tous ses vols prévus entre 19h00 (22H00 GMT) dimanche soir et 10h00 (13H00 GMT) lundi matin.
Marco Montes, un Equatorien de 46 ans, patiente avec son épouse depuis plus de 12 heures à l’aéroport et vient d’apprendre qu’il va devoir encore attendre 24 heures avant de pouvoir rentrer dans son pays.
Après les violents troubles sociaux qui ont frappé l’Equateur début octobre pour protester contre la hausse des prix de l’essence et qui ont fait huit morts, le couple pensait pouvoir profiter de vacances sereines au Chili, considéré comme un modèle de stabilité en Amérique latine.
Quand ils ont quitté la région touristique de Puerto Montt, à un millier de km au sud de Santiago, ils ont été témoins de nombreuses destructions et incendies.
« C’est très similaire (à ce qui s’est produit à Quito). On a quitté l’Equateur en proie aux problèmes et on arrive ici pour trouver des problèmes », constate le quadragénaire.